La rupture est désormais ouvertement revendiquée. À l’occasion de la Journée mondiale de la langue arabe, célébrée le mercredi 17 décembre 2025, la Coalition nationale marocaine pour l’arabisation a appelé à mettre fin à la domination du français au sein de l’État. L’organisation ne plaide plus pour une simple cohabitation linguistique, mais pour une substitution assumée : l’arabe doit devenir l’unique langue de l’administration, de l’économie et du savoir.
Dans un communiqué officiel, les militants de la coalition estiment que la persistance du français dans les rouages de l’État marocain constitue une anomalie historique et constitutionnelle désormais inacceptable.
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Ils exigent notamment que l’administration publique et le secteur financier cessent d’utiliser le français dans leurs documents officiels et leur correspondance, le système éducatif abandonne le français comme langue d’enseignement, en particulier pour les matières scientifiques, le secteur privé soit légalement contraint d’adopter l’arabe ou l’amazigh dans ses services et sa communication.
Le mouvement fonde ses revendications sur l’article 5 de la Constitution marocaine, qui consacre l’arabe comme langue officielle de l’État. Toutefois, les militants dénoncent un décalage persistant entre le cadre juridique et la réalité. Depuis la réforme éducative de 2019, autorisant l’enseignement de certaines disciplines en français, la colère s’est intensifiée parmi les défenseurs de l’identité linguistique nationale, qui y voient une forme de « colonialisme linguistique » freinant l’émancipation du peuple marocain.
Cette mobilisation place le gouvernement marocain dans une position délicate. S’il est constitutionnellement tenu de protéger et promouvoir la langue arabe, il doit également composer avec une réalité économique mondiale dans laquelle le français demeure, à ce stade, un outil de connexion avec certains marchés internationaux.
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Un argument que la société civile mobilisée rejette, estimant que les considérations économiques ne sauraient justifier le sacrifice de la langue nationale.
En mettant le français sur le banc des accusés, la Coalition nationale pour l’arabisation engage un bras de fer politique, culturel et identitaire qui dépasse la seule question linguistique. C’est un choix de société qui se dessine : celui d’un Maroc qui, près de soixante-dix ans après son indépendance, cherche encore à clore définitivement l’héritage culturel de la période coloniale.

