Les victimes des crimes commis dans la province du Sud-Kivu, depuis 1995, réclament avec insistance la mise en place d’une justice transitionnelle, afin de juger les auteurs des atrocités et leur faire payer leurs crimes conformément aux lois en vigueur en République Démocratique du Congo. L’appel est unanime, porté par des voix qui ont vu leurs vies brisées à cause des violences, mais aussi par des associations engagées dans la défense des droits humains.
Une douleur persistante, une justice absente
Bora Jeannette, une victime qui a perdu son frère en 1996, exprime la souffrance de milliers de familles affectées par ces atrocités.
« Il y a plusieurs victimes ici, qui ont perdu leurs proches, tués ou violés. Que le gouvernement prenne ses responsabilités, qu’il lance des enquêtes, retrouve les responsables et que nous soyons indemnisés », martèle-t-elle. Son appel se fait l’écho de celui de nombreux autres survivants, en quête de justice et de reconnaissance.
De son côté, le professeur Espoir Amani, Président des victimes à Bukavu dans la commune d’Ibanda, déplore le retard dans l’application de la justice transitionnelle.
Selon lui, bien que des plaidoyers aient été faits par les victimes et la société civile, le gouvernement reste inactif.
« Où est le blocage ? Les enquêtes sont là, des fausses communes sont identifiées dans la région, mais le processus traîne. Le gouvernement ne veut pas avancer », s’indigne-t-il. Pour lui, il est crucial de connaître la vérité sur les événements passés, mais aussi d’obtenir une réparation, une réconciliation, et une reconnaissance des mémoires des victimes.
Une justice nationale nécessaire
Stella Yanda, de l’organisation Alpha, qui soutient activement les victimes, rappelle que la justice transitionnelle doit impérativement reposer sur une politique nationale.
« La question de la justice transitionnelle ne doit pas être laissée aux seules organisations de la société civile, mais bien au gouvernement », souligne-t-elle. « À ce jour, cette justice n’existe pas encore, il n’y a que des tâtonnements », déplore-t-elle.
Unité pour la justice et la réconciliation
Si plusieurs organisations soutiennent les victimes dans leur quête de justice, ces dernières restent frustrées. La marche vers la réparation est longue et semée d’embûches. L’unité entre la Société civile, les organisations nationales et internationales semble essentielle pour parvenir à un processus efficace et rapide. Une coordination des efforts est indispensable pour apaiser les blessures qui déchirent les familles du Sud-Kivu et au-delà.
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Cette demande des victimes n’est pas nouvelle. En 2020, le Dr. Denis Mukwege, figure emblématique de la lutte pour les droits des victimes des violences sexuelles, a rappelé que sans juger les crimes du passé, la RDC continuerait à être le théâtre de nouvelles violations des droits humains. Il a plaidé pour la création d’un Tribunal Pénal International qui jugerait non seulement les crimes des guerres passées, mais aussi ceux commis jusqu’à aujourd’hui.
Ainsi, au-delà des discours et des revendications, l’heure est à l’action. Les victimes attendent de la justice, de la reconnaissance, mais aussi de véritables mesures pour guérir les traumatismes qui les hantent depuis des décennies. Il est grand temps que le gouvernement réponde à leur appel.
Il faut dire que ces interventions entrent dans le cadre l’émission « Chronique de la Justice Transitionnelle », organisée par le Réseau des Journalistes pour la Justice Transitionnelle à Bukavu, avec le soutien d’ « Impunity Watch ».