La République démocratique du Congo vient de saisir le Conseil de sécurité, par son Ministère des Affaires étrangères et Francophonie, au sujet du bombardement contre le camp des personnes déplacées de Mugunga, effectué le vendredi 3 mai dernier par l’armée rwandaise et ses supplétifs terroristes du M23.
C’est le Vice-Premier Ministre, Ministre des Affaires étrangères qui l’a fait savoir au corps diplomatique accrédité en RDC, lors d’une séance de travail qu’il a présidée dans son cabinet.
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« Nous venons de saisir le Président du Conseil de sécurité. Nous espérons que de ce côté-là, nous allons nous comprendre. Je ne vais pas vous donner la teneur de la lettre, mais comme c’est un document du Conseil, il sera distribué certainement aux représentants des pays qui sont membres Permanents et non Permanents », a déclaré Christophe Lutundula Apala Pen’Apala.
La RDC, a-t-il ajouté, salue la condamnation, par les États-Unis d’Amérique, de cette attaque. Tout en appréciant l’élan de solidarité et de compassion, manifesté par ses partenaires à travers leurs déclarations respectives, le Chef de la diplomatie congolaise a indiqué que son pays exhorte les diplomates étrangers en poste à Kinshasa à éviter « l’équilibrisme » et toute attitude pouvant entraîner la confusion dans l’opinion publique.
« Il faut éviter la confusion et trop d’équilibrisme. En politique comme en diplomatie, la neutralité n’est pas toujours neutre. Il faut faire comme un arbitre de football. Il est neutre mais sanctionne. C’est ça la neutralité, parce que j’ai vu et j’ai cru comprendre qu’on faisait allusion au fait qu’on alignerait des armes autour du camp. Nous ne sommes pas d’accord avec cette lecture. Le camp des personnes déplacées n’est pas en dehors de la RDC, c’est sur le territoire de la RDC et les personnes déplacées sont des Congolais. Deux conséquences: la première, la responsabilité de protéger le camp et les compatriotes qui sont là incombe d’abord à la RDC. De deux, même si il y a ces armes-là, si à partir du camp des réfugiés, il n’y a pas une provocation vers le M23 et l’armée rwandaise, il n’y aucune raison qu’on puisse tirer. Et enfin, on sait bien qu’à tel endroit se trouve un camp de réfugiés, sur le plan du droit international, il y a des règles, on ne peut pas tirer sur un camp des déplacés de guerre. Nous n’avons pas apprécié certaines formulations qui prêtaient à équivoque, qui semblaient dire que nous-mêmes nous sommes les bourreaux de nos compatriotes. J’ai beaucoup apprécié la sincérité dans l’amitié, la sincérité par rapport à la vérité, les États-Unis d’Amérique qui ont dit clairement que ça venait de tel endroit par telle force, et on a même oublié de là où sont partis les roquettes, c’est de l’espace qui est sous contrôle de l’armée rwandaise et ses alliés le M23 ».
Au nom du Président et du Gouvernement, précise Christophe Lutundula appelle à la clarté dans les messages.
« Je devais sans chercher de polémique dire que cette confusion n’est pas bon. Où on veut aller vers une solution, solution diplomatique, on y va. Les autorités congolaises ne peuvent pas être si irresponsables de vouloir que la guerre continue. Il vaut mieux ne pas faire de déclaration, que de faire une déclaration qui crée des équivoques, des malentendus entre nos pays. Chaque pays est souverain. Nous avons tous la mission de gérer bien la souveraineté de nos Etats. Cette souveraineté s’intègre dans une dynamique d’amitié ».
C’est pénible, poursuit Lutundula, « que cela soit arrivé parce que les uns et les autres sont préoccupés par l’ensemble de la question de la crise sécurité au Kivu ».
« Tout le monde voudrait avoir des avancées vers la paix. Construire la paix c’est ce qu’il y a de plus difficile mais de plus noble et de plus beau quand on a réussi », a relevé le Vice-Premier Ministre qui informe aussi ses hôtes que le plan de démantèlement des FDLR, conformément à la dernière réunion organisée sous l’égide de l’Angola à Luanda, a été proposé au Président João Lourenço, médiateur désigné par l’Union africaine en mai 2022 dans le cadre du processus dit de Luanda
Malheureusement, constate-t-il, alors que tout le monde est dans l’attente de la prochaine rencontre dans le cadre de ce processus de Luanda, ce bombardement « est venu comme un coup d’arrêt ».
« Sans refuser de poursuivre les discussions, on est quand même mal à l’aise comme personnes, êtres humains, de se retrouver dans ces conditions-là face aux responsables rwandais, parce que nous savons d’où c’est venu. Humainement parlant c’était chaud, c’est encore chaud en terme de tristesse pour que nous puissions être vraiment dans un état d’esprit des discussions franches ».
Le Ministre des Affaires Etrangères a toutefois promis que cette attaque ignoble n’arrêtera pas l’engagement de la République démocratique du Congo pour le retour de la paix et la sécurité dans l’Est de son territoire et dans la région des Grands Lacs.
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« Les discussions vont continuer mais pour le moment, il faut quand même des clarifications », explique le Chef de la diplomatie congolaise qui déplore également que « quand on veut avancer, il y a un coup qui tombe ».
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