Le procès historique de l’ancien chef de guerre congolais Roger Lumbala Tshitenga pour complicité de crimes contre l’humanité s’ouvrira à Paris le 12 novembre 2025.
Selon un communiqué conjoint de la Clooney Foundation for Justice (CFJ), TRIAL International, Minority Rights Group (MRG), Justice Plus et PAP-RDC, toutes parties civiles dans cette affaire, ce procès constitue une étape cruciale pour rendre justice aux survivant(e)s des atrocités commises en République démocratique du Congo (RDC) par un ressortissant congolais.
Roger Lumbala, ancien chef du Rassemblement Congolais pour la Démocratie Nationale (RCD-N), est accusé d’avoir dirigé ou facilité des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis entre 1998 et 2003, durant la deuxième guerre du Congo. Ses forces, épaulées par des milices alliées, auraient mené l’opération militaire baptisée « Effacer le tableau » dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, marquée par des attaques systématiques contre la population civile, notamment contre les minorités Nande et Bambuti.
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Après la guerre, Roger Lumbala avait été nommé ministre du Commerce en RDC (2003-2005), avant d’être mis en accusation en 2023 par les juges d’instruction du tribunal judiciaire de Paris. Cette procédure s’appuie sur le principe de compétence universelle, qui permet à la justice française de poursuivre les auteurs présumés de crimes internationaux graves, même commis à l’étranger.
« Pendant trop longtemps, les auteurs de ces crimes ont échappé à la justice, certains accédant même à des postes de pouvoir. Ce procès est une étape historique pour briser ce cycle d’impunité. Il montre que même des décennies plus tard, la voix des survivant(e)s compte, et que la responsabilité est essentielle pour construire un avenir de paix et de dignité en RDC », a déclaré Daniele Perissi, responsable du programme RDC chez TRIAL International.
Si les tribunaux congolais ont enregistré quelques avancées dans la répression des crimes récents, l’impunité demeure quasi totale pour les atrocités de la deuxième guerre du Congo, qui a fait plusieurs centaines de milliers de victimes. Ce procès représente donc une occasion historique pour les survivant(e)s de confronter une des figures présumées responsables de ces crimes.
« L’ouverture du procès nous rappelle que, malgré la multiplication des conflits dans le monde, la lutte contre l’impunité continue. Les survivant(e)s de violences sexuelles, de tortures et d’atrocités de masse ont fait preuve d’un courage extraordinaire. Leur force inspire l’espoir à toutes les victimes, et nous sommes fier(e)s de les soutenir », a affirmé Yasmine Chubin, directrice juridique à la CFJ.
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Vingt ans après les faits, le contexte en RDC demeure préoccupant : les violences armées persistent dans le Nord et le Sud-Kivu, alimentées par des groupes armés bénéficiant d’appuis extérieurs. Cette situation, selon les organisations, démontre que l’impunité des crimes passés nourrit les conflits actuels. Pour parvenir à une paix durable, soulignent-elles, la justice et la réparation sont indispensables.
« Bien que la lutte contre l’impunité puisse ressembler à un combat permanent, ce procès est un moment crucial. Il offre enfin aux nombreuses victimes congolaises une plateforme pour que leur quête de reconnaissance soit entendue par les tribunaux », a ajouté Xavier Macky, directeur national de Justice Plus.
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Au-delà du cas individuel de Roger Lumbala, ce procès constitue un signal fort envoyé à tous les auteurs d’atrocités : l’impunité ne sera pas éternelle. Alors que la violence continue de ravager l’Est de la RDC, cette procédure, portée par le courage des survivant(e)s et des organisations de la société civile, rappelle une vérité essentielle :
il ne peut y avoir de paix durable sans vérité, justice et réparation.
Ce procès attendu à Paris s’impose ainsi comme une lueur d’espoir pour briser le cycle de la violence et rendre enfin justice aux victimes de la deuxième guerre du Congo.
Edith Kazamwali